L’annonce par le gouvernement de la fin de l’appatage permanent dans la lutte anti-rongeurs (il y a 2 ans) continue de faire l’effet d’une bombe chez les professionnels du secteur.
On a l’impression que cette technique constitue (et a toujours constitué) l’unique rempart connu pour lutter efficacement contre les infestations de rongeurs. Avec son interdiction (dans sa forme permanente, rappelons-le) on prédit des infestations en série, mettant sérieusement en péril la santé publique de notre pays (le risque sanitaire existe bel et bien). On cherche maintenant de nouveaux moyens de luttes efficaces qui pourront prendre la relève, qu’ils soient autorisés ou non…
Pour rappel, en France l’appâtage permanent est totalement interdit, ce depuis le renouvellement des autorisations de mise sur le marché des rodenticides. L’interdiction porte bien sur l’usage PERMANENT des biocides. Ceux-ci peuvent encore être utilisés dans le cadre, avéré, de la régulation de la population de rongeurs en cas d’infestation. Les rodenticides ont donc encore quelques beaux jours devant eux. D’autant que la technique en elle-même n’est pas remise en cause puisque les professionnels peuvent utiliser des placebos pour remplir la fonction « surveillance ».
L’appatage permanent ne permet pas de ne toucher que les nuisibles visés : d’autres animaux peuvent potentiellement ingérer les substances toxiques à partir du moment où ils peuvent accéder à l’intérieur du poste d’appâtage (insectes, petits oiseaux…). Cela est moins vrai lorsque les postes d’appâtage sont positionnés en intérieur.
Il est prouvé par de nombreuses études que les rongeurs développent des mutations qui leur permettent de résister aux effets des rodenticides. Pour continuer à être efficaces, ceux-ci deviennent de plus en plus toxiques, et les rongeurs s’adaptent à chaque nouvelle génération. Un cycle sans fin.
L’usage non systématique de ces substances leur permet donc de conserver une efficacité plus longue dans le temps, d’une réelle utilité en cas d’infestation.
L’usage de l’appâtage permanent est très répandu et relève presque de la tradition. Son efficacité ne semble plus à démontrer, et pourtant on voit bien, en se promenant dans des squares en ville, en lisant l’actualité riche de faits divers concernant les rats et leurs dégâts, en consultant des études, que cette technique peine à remplir son rôle de régulation des populations de rongeurs, et encore moins celui de prévention des infestations.
Différentes études vont dans ce sens de manière non équivoque : les rongeurs s’adaptent aux générations successives de rodenticides, les rendant moins efficaces dans leur fonction première, tout en devenant de plus en plus nocifs pour les animaux non ciblés. A cela s’ajoute l’utilisation systématique des postes d’appâtage comme s’il s’agissait de la seule solution anti-rongeurs existante, occultant de fait toutes les autres méthodes , pour certaines pourtant en place depuis de très nombreuses années.
Quand je dis cela, je pense par exemple à ces centaines de boites d’appâtage que l’on a pu voir ceinturer certains bâtiments de l’industrie agro-alimentaire, alors que la source d’alimentation naturelle des rongeurs ciblés n’est pas protégée : fissures et points d’entrée non colmatées, réserves extérieures exposées…
Avec cette restriction d’utilisation des rodenticides, certains professionnels vont être amenés à revoir leurs méthodologie et leur approche des problématiques rongeurs, à s’ouvrir à d’autres techniques dont ils avaient peu ou pas connaissance. Certains l’ont déjà fait.
On parle alors de l’émergence de méthodes alternatives, dont l’efficacité est régulièrement, souvent sans fondement, remise en cause. Je n’aime pas ce terme « alternative », parce qu’il sous-entend qu’elles sont un palliatif. De surcroit peu efficace ne cesse-t-on de répéter en boucle.
Et c’est peut-être là que le bât blesse vraiment. Ce leitmotiv : « Des solutions alternatives existent, mais elles sont peu efficaces. » Sans même avancer un argument, ou une étude scientifique à l’appui. Il n’est même pas fait de distinction entre les différentes solutions alternatives. Elles sont toutes jugées inefficaces face aux rodenticides, dont la baisse d’efficacité est pourtant mesurée et documentée.
Rappelons que le champs des solutions alternatives est vaste, varié et qu’il n’interdit pas, au contraire, la combinaison de ces systèmes entre eux, bien au contraire. Cela dans le but d’apporter une réponse adéquate et raisonnée à la problématique du client, même si elle implique à un moment ou à un autre l’usage de rodonticide. Le principe de lutte intégrée anti-nuisibles en est le parfait exemple !
Ces solutions semblent toujours considérées comme des alternatives émergentes, alors qu’elles font pourtant leurs preuves depuis 10, 20, 40 ans : de l’introduction de prédateurs naturels à la répulsion par ultrasons en passant par l’optimisation de l’herméticité des bâtiments ou l’usage de capteurs qui mesurent l’activité des rongeurs en temps réel, et j’en passe… Tous ces procédés fonctionnent, sont performants et ce sont les utilisateurs qui le disent :
La société évolue, ses attentes et ses priorités également. Le bien-être animal et l’impact environnemental sont de plus en plus pris en compte dans nos décisions quotidiennes.
La fin de l’appatage permanent a cela de bénéfique qu’elle va permettre à la profession d’évoluer au même rythme, de s’ouvrir à de nouvelles techniques, de développer de nouvelles approches de la lutte anti-rongeurs, et d’apporter des solutions adéquates, raisonnées et performantes à chaque situation.